Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Le diable n'est pas mort à Dachau

Maurice Gouiran

Edition : Editions Jigal (Collection Polar)

Prix : 18.50 euros

Où ? : Editions Jigal / Place des libraires

216 pages

Gagné lors d'un concours

Le diable n'est pas mort à DachauLe diable n'est pas mort à Dachau
En gagnant ce roman lors d'un concours, je ne mesurai pas la chance de découvrir Maurice Gouiran. Inconnu de mon univers littéraire, cet auteur fait naître toute une série de réflexions sur la manipulation des hommes et notamment gouvernementale. Point de conspiration ou autre signe paranoïaque, mais une documentation fournie de l'Histoire et de la science. En entraînant le lecteur de Dachau pendant la Seconde Guerre Mondiale à Agnost-d'en-haut en 1967, il tisse la toile du réseau du mal et de l'expérimentation. Construit comme une enquête classique, l'étendue des découvertes, elle, ne l'est pas. Entre goût de terre, flower power et imposture, le petit village d'Agnost-d'en-haut n'a jamais autant été sous les feux des projecteurs...

Il reste ainsi un long moment, immergé dans le paysage de son enfance, et ça lui fiche un de ces cafards... Il s'est ennuyé ici. Des heures, des jours, des mois, des années... Il y a perdu son temps. Pire, il y a perdu sa jeunesse. Ce pays n'est pas - ne sera jamais - le sien même s'il y est né vingt sept ans plus tôt. (...) Ici, l'hiver est sans pitié. (..) Si les femmes et les hommes du pays le supportent, c'est certainement parce qu'ils sont pareils à ce terroir, âpres et farouches. Ils sont des fils de l'hiver, repliés sur eux-mêmes. Ils puent l'étable et la bergerie et traînant les remugles hircins jusqu'au fin fond de leurs couches.
Il ne les aime pas.

Retour au pays natal

De retour à Agnost-d'en-haut en 1967 pour l'enterrement de sa mère, Henri Majencoules retrouve la terre et l'austérité du hameau qui peuplait son enfance. Mathématicien travaillant sur le projet Arpanet en Californie, le jeune homme de vingt-sept ans se confronte en silence à un père indifférent. Cependant, la cruelle monotonie des lieux est interrompue par le meurtre d'une famille américaine, les Stokton, installée depuis deux ans. Surpris qu'un tel fait puisse se produire dans une contrée aussi reculée, Henri va mener avec l'aide d'Antoine Camaro ancien camarade devenu journaliste, une enquête des plus bouillonnante.

Entrecoupée de flash-back sur des médecins nazis exerçant dans le camp de Dachau, cette enquête prendra une tournure inattendue...

Bien entendu, il déplore qu'on veuille systématiquement faire passer les savants allemands pour des personnalités perverses et sadiques, mais la loi du vainqueur n'impose-t-elle pas au vaincu d'être responsable de tous les maux ? Il reste persuadé que la plupart des médecins expérimentateurs de Dachau étaient de bons citoyens, de bons pères de famille, de bons maris qui ne faisaient que leur devoir, qui s'acquittaient de leur tâche avec sérieux et diligence dans un contexte éprouvant. Rien de plus.

Expériences et faux-semblants

D'une plume tranchante, Maurice Gouiran nous entraîne dans les méandres de la science et de l'Histoire. Dans un décor fait de terre et d'humidité, il se sert du meurtre de la famille Stokton pour expliquer les actes nazis à Dachau. Comment, me direz-vous ? Chaque chose en son temps...

Troublant et noir, ce polar à la construction plutôt classique révèle une histoire complexe. Complexité relationnelle entre Henri et son père, entre ruralité et métropole. Complexité entre liens historiques, mais aussi entre des actes injustifiables, perçus comme tels lors d'une guerre, et qui le sont à une autre époque, dans un autre pays. Pour vous donner un indice, je ne peux que vous révéler la récupération des médecins nazis par les Etats-Unis... Ainsi, à travers les interrogations de son protagoniste, l'auteur questionne sur la notion de "gentils" et de "méchants" et sur les expérimentations secrètes de tous bords et leurs répercussions.

En parcourant ce récit mordant, j'ai beaucoup aimé la description des sentiments d'Henri liée à l'environnement de ce hameau hostile aux étrangers, mais aussi les faux-semblants derrière se cache les habitants. Très documenté, le flower power et le LSD festif que côtoie Henri en Californie est en totale contradiction avec la noirceur qui s'empare de l'enquête.

Malheureusement, je ne peux en dire plus sur l'intrigue par peur de vous révéler toutes les ficelles qui relie les époques. Sachez juste que le pouvoir de réflexion de Maurice Gouiran est assez fort pour utiliser l'Histoire afin d'éclairer notre époque. 

Cette fois-ci, pas de gourmandises ! Du thé, du thé et encore du thé...et un corsé de préférence ! Parce que cette histoire est juste glaçante et semée de faits véridiques, elle m'a coupé l'appétit. Fallait le faire !

Lecture conseillée : Les impliqués, Zygmunt Miloszewski

 

Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article