4 Mars 2017
Leila Slimani
Edition: Gallimard (broché) / Folio (poche)
Prix: 17.50 euros (broché) / 7.20 euros
Où?: Place des libraires
230 pages
Emprunté
Avant de gagner le prix Goncourt avec Chanson douce Leila Slimani a écrit un premier roman: Dans le jardin de l'ogre, qui évoque une sexualité féminine exacerbée et maladive. Portée par la critique lors de la rentrée littéraire 2014, je suis restée perplexe face au sujet abordé. Il est vrai que cette rentrée entre le signe de la sexualité et la boucherie, était plutôt surprenante, voir inhabituelle. Les mois passent et j'oublie. Mais plus pour longtemps...
Adèle est une femme. Adèle est journaliste dans un journal parisien. Adèle fait l'amour avec des hommes différents. Adèle est mariée et à un enfant. C'est l'histoire d'une femme nymphomane qui a besoin pour exister, vivre, de faire l'amour partout, tout le temps avec des hommes de passage quitte à prendre des risques. Mariée à Richard, chirurgien, elle mène une vie confortable, bourgeoise au sein de la capitale. Un enfant, Lucien, elle a tout pour être heureuse mais non. Car son addiction est plus forte qu'elle, elle a besoin de sentir sa chair meurtrie par un autre, de sentir le sexe d'un autre la pilonner, de goûter l'interdit. Le sexe est un moteur, un but et motive ainsi son existence.
Bien que le sexe soit finalement le pilier du roman, le mensonge qui en découle n'est pas en reste. D'abord naturel, léger il devient ensuite menaçant et enfin incontrôlable. L'imposture est supplantée par un désir violent, irrépressible, brutal. Car au delà des aventures, la jouissance d'Adèle n'est pas dans les aventures sans lendemain mais dans l'aboutissement du sexe. L'image nombriliste qu'elle donne d'elle est caractéristique d'un narcissisme maladif qui passe chez elle à travers la recherche du plaisir total, limite tyrannique. Pour guérir il lui faudrait, peut-être se réconcilier avec son enfance bercé par une mère irresponsable.
Porté par un style chirurgical, Leila Slimani écrit un roman violent, animal qui, jamais sans juger, décrit les dérives et les souffrances d'une femme où la tolérance et la morale ne sont qu'apparences. Elle soulève une question essentielle sur la sexualité dans notre société, qu'elle soit féminine ou masculine. L'image du "moi" n'est pas un diagnostique de l'auteur mais explique la souffrance qu'Adèle cultive.
Un roman sans concession qui nous emmène dans les méandres d'un esprit torturé, en détresse, pour un public averti. Pour apporter un peu de douceur, un thé vert nature accompagné d'un carrot cupcake feront de votre journée une immersion psychologique épicé.
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