8 Juillet 2019
Traduction : Marthe Lomont
Editions : Belfond (collection Le Cercle)
Prix : 21 euros
Où ? : Belfond / lalibrairie.com
435 pages
Service de presse dans le cadre des lectrices VIP du Cercle Belfond
Pendant ses études en Australie, Kate avait toujours été la fille de deux missionnaires assassinés, l’héroïne d'un tragique fait divers qui avait marqué les esprits. A l'école, les filles la jalousaient pour cette réputation qui l'associait à quelque chose d'à la fois grandiose et lointain. Cela avait valu à Kate une popularité qu'elle avait d'abord acceptée avec soulagement. Mais, au fil du temps, bien des questions vinrent la tourmenter. Pour commencer, le sens même de l'oeuvre des missionnaires, cette philosophie du devoir et du sacrifice qui avait si profondément marqué son éducation. Elle conçut des doutes sur cet héritage intellectuel et moral tout en étant déterminée à demeurer à jamais fidèle au souvenir de ses parents martyrs. Elle était et serait toujours la fille des Carrington. Le drame survenu à Langali représentait la toile de fond sur laquelle se déroulerait le fil de son propre destin.
Mais, voilà cinq ans, tout avait changé.
Un affreux drame survenu en 1974 dans le village de Langali au Tanganyika, actuelle Tanzanie, met fin à l'existence heureuse de Kate, alors âgée de 12 ans. Ses parents, Sarah et Michael Carrington, infirmière et médecin missionnaires sont retrouvés sauvagement assassinés à leur domicile. Seule Annah Mason, leur fidèle amie et marraine de Kate, réchappe au massacre. Pourquoi elle ? Que s'est-il passé ?
Vingt ans plus tard Kate, rentrée en Australie depuis le terrible drame, se lie d'amitié avec une nouvelle et excentrique voisine. Jusqu'au jour où celle-ci lui avoue être Annah, sa propre marraine oubliée depuis longtemps. Cette dernière va livrer à sa filleule la vérité sur son enfance africaine à travers la voix de son propre récit.
Avec ses magnifiques descriptions et son agilité narrative, le roman de Katherine Scholes à tout pour plaire ! Cette fresque familiale et africaine exposée comme le récit d'une infirmière missionnaire fait fusionner deux mondes, deux cultures différentes, mais complémentaires. De ce mélange, naissent des tragédies, mais aussi des espoirs, meurent des amours, bousculent la vie.
Pourtant, après quelques pages, un doute m'assaille. L'aspect religieux, sera-t-il un frein à ma lecture ? L'opinion tranchée des missionnaires australiens ne viendra-t-elle pas la gâcher ? Et bien non ! Malgré mes craintes, l'auteure a su retranscrire les mentalités de l'époque et les faire évoluer avec son décor et ses personnages, déjouant le piège de l'auteure blanche qui écrit sur l'Afrique. Car la romancière sait de quoi elle parle. Une enfance passée dans une mission en Tanzanie peut à coup sûr créer la matière suffisante à l'écriture d'un livre.
De cette mystérieuse et envoûtante Afrique peuplée de sorciers et de guérisseurs comme de dialectes inconnus, la romancière en fait un livre un brin politique et social en abordant tour à tour la décolonisation, les rivalités ethniques, la place des traditions au sein des tribus, mais aussi le manque de soins médicaux. Mais c'est bien à travers les yeux d'Annah, son personnage principal, que Katherine Scholes réussit à capter notre attention. Avec une certaine magie, elle réussit à créer un personnage féminin puissant, magnétique et séduisant, frôlant parfois la perfection. Trop peut-être ?
Rappelant pour quelques uns La ferme africaine, de Karen Blixen, il m'a quant à moi fait penser par bien des aspects à Mille femmes blanches de Jim Fergus. Avec ses personnages aboutis et ce choc des cultures, ces romans partent alors en croisade avec pour message union et tolérance.
Souffrant parfois de longueurs, l'histoire de cette infirmière va vous émouvoir, parfois vous effrayez, mais surtout vous fasciner. Merci donc aux éditions Belfond de faire revivre, une fois de plus, ce livre enivrant !
Pourquoi lire ce roman ? Pour qui ?
Lectures conseillées : Mille femmes blanches, Jim Fergus
La ferme africaine, Karen Blixen
Et si on terminait sur une note gourmande ? Difficile de trouver une sucrerie digne de ce roman ! Après réflexion, le gâteau manioc me paraît tout indiqué pour compléter cette lecture. Tout comme ce livre, ne vous laissez pas fier par son aspect, mais laissez-vous surprendre par sa délicate odeur anisé révélant ainsi un goût et une texture douce et compact. Délicieux !