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Captifs

Kevin Brooks

Traduction: Marie Hermet

Edition: Super 8 (broché) / 10/18 (poche)

Prix: 18 euros (broché) / 7.50 euros (poche)

Où?10/18

          Place des libraires

Acheté en librairie d'occasion

Captifs
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Captifs

Thriller ?

Je commencerais l'année avec un roman qui m'a interpellé. Beaucoup ! Un huis clos oppressant, un ravisseur dont on ne connaît rien, des enlevés au nombre de six enfermés dans un bunker, des privations et des récompenses. Pas un polar pas vraiment un thriller, mais plutôt une introspection psychologique. J'ai titillé votre curiosité ? Tant mieux car j'ai été autant surpris que dubitative. 

 

 

Le pitch...

A seize ans Linus a déjà goûté aux désagréments de la vie. Une mère qui n'est plus, un père aux abonnés absents et un abonnement au pensionnat le confortent dans son choix de vie marginal. Fatigué de supporter un père étourdi par l'argent et la drogue, il claque la porte pour ouvrir celle de la rue. Désormais SDF, il découvre un monde glacé et glaçant, mais n'était pas préparé à ce qui l'attendait... Amadoué puis kidnappé par un homme se faisant passer pour un aveugle Linus se réveille seul un matin, dans un bunker. Alors qu'il examine les lieux comportant une cuisine, une salle de séjour, une salle de bain et six chambres, il se sait observé par de minuscules caméras. Les jours passent, mais sa solitude est vite remisée par l'apparition d'autres détenus arrivés par le seul et unique accès vers l'extérieur: l'ascenseur. Ainsi, une petite fille, un vieil intellectuel, un toxicomane, un autre homme et une autre femme complètent le sordide tableau. Qui est derrière tout ça  ? Pourquoi eux ? Comment sortir? Mais si la vraie question était de survivre aux autres ? 

 

 

Mais encore?

Journal du jeune Linus, j'ai été très surpris par la forme du roman. Non seulement, il s'adresse directement au lecteur, mais il instaure une proximité, une intimité avec celui-ci. J'avais la forte impression de détenir un VRAI journal de bord, d'une personne VRAIMENT enlevée, ce qui a renforcé mon malaise. Ce journal loin de n'être qu'un recueil de pensées devient une arme, un moyen détourné d'éventuellement piéger le ravisseur qui met volontairement à disposition de tous les détenus des cahiers... Tordu ? Oh oui !

Comme un voyeur ou un témoin de l'horreur, le lecteur pressent que l'effroi n'est que le début d'un long processus psychologique...

Je vois que je ne me suis pas entièrement expliqué sur qui je suis. Je ne t'ai pas encore dit ce que tu as peut-être envie de savoir, ou pas: mon histoire, ancienne et récente, les détails de ma vie. Mais il faut que tu considères les choses de mon point de vue. Il faut que tu comprennes ce que tu es pour moi.
Là, maintenant, tu n'es qu'un bout de papier. Au mieux, un miroir. Au pire, un moyen de parvenir à mes fins. La vérité, c'est que je ne fais pas que ça: me parler à moi-même. Je parle à Linus Weems.

Ne soyez pas surpris par le nihilisme du récit ni l'expérience d'enfermement qui en ressort, mais pensez plutôt tests sociologiques et observations. Comment vont-ils tous interagir entre eux? Alors que les personnages découvrent leur nouvel environnement et les codes qui en régissent les règles, Kevin Brooks expose leurs psychologies, leurs forces comme leurs faiblesses. Parfois attachants comme effrayants, ils regorgent tous d'une violence plus ou moins maîtrisée. J'y ai vu des moments de tendresses, de la brutalité, mais surtout un degré de folie encouragé par l'ennui et la solitude.

La situation se dégrade rapidement par de petites défaites à piéger leur kidnappeur, ce qui ne fait qu'attiser ses vengeances pour mieux diviser, révélant cruauté et individualisme de certains. Sournois ce ravisseur ? Plutôt oui... D'autant plus qu'on ne sait absolument rien de lui, de ses motivations et de ses intentions sinon à jouer avec ses victimes !

Ici au sous-sol, les soirées durent des éternités.
Il n'y a pas grand chose à faire.
Je réfléchis à toutes sortes de choses. (...)
Sérieux.
Penser, ce n'est pas criminel.
Mais j'ai une autre raison pour ne pas tout te dire, une raison plus pratique. Tu vois, tu es l'inconnu. (...) J'écris toujours le dos tourné aux caméras. Mais ici, il n'y a aucune garantie. N'importe quoi peut arriver. Je n'ai aucun moyen de savoir si le Type à l'étage au-dessus n'est pas en train de lire dans mes pensées. Je n'ai aucun moyen de savoir s'Il le fait.

Pour finir...

Vous l'aurez compris la paranoïa atteint invariablement son paroxysme jusqu'à... non mais avez vraiment cru que je vous donnerai des indices ? La fin, déstabilisante, laisse un goût d'inachevé. Mais est-ce vraiment l'essentiel ? Pour moi le romancier tente de créer une ambiance, décortiquer le comportement au-delà d'un début et d'une fin. Au fond, ne sommes-nous pas le fruit de son expérience ? 

Pour apprécier pleinement ce roman, un café bien noir et toute une fournée de palets aux raisins ne seront pas de trop pour venir à bout de ce faux journal.

Lecture conseillée Parfaite, Caroline Kepnes

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